Projet DEPHY-Abeille : multiplier les ressources pour les pollinisateurs

Par Itsap-Com, le 9 June 2017

Entre avril et août, on le trouve dans les champs en train de faire des relevés de pollinisateurs et compter les coquelicots et autres plantes adventices, si redoutées par les cultivateurs. Fabien Vialloux est l’opérateur de terrain du projet DEPHY-Abeille au sein de l’Itsap et suit à ce titre un réseau de 10 exploitants agricoles avec chacun 3 parcelles en expérimentation.

Quelle est la nature de DEPHY-Abeille ?

C’est un projet mené par l’Itsap sur 6 ans, qui se terminera en 2018. Il consiste à réduire les produits phytosanitaires et les fertilisants sur chaque parcelle pour augmenter la flore dans les parcelles et réduire le risque d’exposition des abeilles aux produits. Chaque agriculteur volontaire pour participer à ce test a accepté de modifier ses itinéraires techniques sur 3 parcelles. Il réduit librement les intrants comme il le souhaite, en nous fournissant bien sûr le détail de ses pratiques. Chaque parcelle est divisée en 2 parties : l’une sans changement de pratique, l’autre avec une baisse des intrants d’une surface minimum d’un hectare.

Quels types de cultures pratiquent ces 10 exploitants ?

Ce sont des céréaliers. Il y a donc principalement du blé, de l’orge, du tournesol, du colza.

Qu’apporte la réduction des traitements ?

Une ressource supplémentaire et de qualité pour les pollinisateurs. Lorsque le colza et le tournesol fleurissent, les abeilles peuvent butiner. Mais dans les champs de blé, elles n’ont plus de fleurs à disposition. L’idée est donc de multiplier les ressources entre la floraison des oléagineux, en favorisant une flore spontanée. L’ambition est de trouver un niveau de réduction des intrants qui soit compatible entre le maintien de la production des cultivateurs et la restauration d’une ressource de qualité pour les abeilles.

D’avril à juillet, vous êtes sur la Zone Atelier Plaine et Val de Sèvre, située dans les Deux Sèvres. Que mesurez-vous ?

Sur chaque lieu d’expérimentation, je compte les plantes adventices en procédant par carré (quadrat) d’1m x 1m, sachant que les parcelles font entre 2,5 ha et 20 ha ! Je relève également la diversité des pollinisateurs qui fréquences ces plantes adventices en fleurs. J’assure également le suivi de la culture jusqu’à la récolte. Tout doit être étudié : la quantité de phytos utilisés ou pas car certains exploitants les suppriment totalement, la météo et la production agricole, en quantité et en qualité. C’est pour cela que le projet s’étend sur 6 ans, notamment à cause des aléas climatiques qui sont pris en compte. Au final, il faut pouvoir mesurer si le fait de laisser pousser des adventices a un impact sur le rendement agricole, si l’exploitant s’y retrouve économiquement parce qu’il a moins de coûts de production (achat d’intrants réduit), si ces plantes messicoles ont favorisé la production de nectar et de pollen.

Et l’hiver, que faites-vous ?

J’effectue les saisies des relevés du projet DEPHY-Abeille et je réalise des enquêtes auprès d’agriculteurs participant à d’autres expérimentations en lien avec le CNRS de Chizé.

Pour terminer, quel est votre parcours ?

Je suis entré à l’Itsap il y a 2 ans comme technicien supérieur apicole, après avoir pas mal bougé : une licence en agronomie puis des emplois successifs chez Limagrain, à la Direction départementale des territoires et au CNRS. Je suis d’ailleurs basé dans les locaux du CNRS à Chizé (79). Entre deux postes, j’ai créé une entreprise de commercialisation de champignons en Corrèze (Plateau de Millevaches) et j’ai des ruches. J’en ai eu jusqu’à 150 mais j’ai subi de lourdes pertes. D’où mon arrivée à l’Itsap car je me suis senti démuni face à ces pertes et j’ai souhaité m’impliquer dans la recherche en faveur des abeilles. C’est bien tout l’objectif de DEPHY-Abeille : réduire les phyto en céréaliculture en prenant en compte la protection des pollinisateurs.