Le projet BEETRIP : mieux comprendre les déterminants de la production de miels d’acacia et de châtaigner

Par Itsap-Com, le 19 February 2020

Pour définir les conditions qui favorisent ou pénalisent la production des miels d’acacia et de châtaigner, le projet BEETRIP a été mené. Si la taille des colonies est confirmée comme un facteur favorable à la production de miel, les niveaux d’infestation par varroa et de contamination des pollens par des résidus de pesticides sont quant à eux des facteurs la pénalisant.

Un partenariat ADA-AURA, INRAE et ITSAP

L’ADA-AURA a sollicité l’INRA d’Avignon et l’ITSAP-Institut de l’abeille afin d’élaborer le projet BEETRIP. Après 3 années d’étude sur le terrain (2016-2018) et une année consacrée à l’analyse des milliers de données enregistrées, une journée de restitution a été organisée à Valence le 29 novembre 2019 afin de présenter les résultats devant une centaine d’apiculteurs de la région Auvergne-Rhône Alpes.

Quelle est l’influence des parcours de transhumance au printemps sur la production de miel d’acacia et de châtaigner ?

L’objectif principal autour duquel le projet BEETRIP (projet FEADER Rhône-Alpes) fut bâti était de déterminer quel parcours de transhumance en début de saison (moyenne montagne ou grande culture ou arboriculture) était le plus favorable pour la production de miel d’acacia et de châtaigner les mois suivants. Pour se rapprocher au plus près de « la réalité du terrain », le cheptel expérimental (3 ruchers de 22 colonies) a été confié à un apiculteur professionnel et conduit dans un souci de conciliation entre les contraintes de la science et celles de l’exploitation. Les données recueillies au cours des saisons 2016 à 2018 par l’équipe de l’ADA-AURA nous ont d’abord permis de décrire et d’étudier quelles étaient les dynamiques populationnelles, l’état de santé des colonies et les quantités de miel produites par celles-ci pour chacun des parcours (Tableau ecotox1).

Parallèlement, des mesures complémentaires ont été réalisées dans le but de caractériser la qualité toxicologique et la diversité des ressources alimentaires collectées par les abeilles dans les différents environnements. Les relations entre les caractéristiques des parcours, la dynamique des colonies et les productions de miels ont par la suite été analysées à l’aide de modèles statistiques afin d’identifier les facteurs influençant la production de miel d’acacia et de châtaigner.

Parmi les trois parcours de transhumance étudiés, plusieurs arguments suggèrent que le parcours qui débute la saison par la miellée de colza est le plus favorable pour produire du miel d’acacia.

1) Les groupes de colonies qui réalisent ce parcours colza-acacia produisent respectivement 140 kg et 69 kg de miel d’acacia de plus que les groupes qui ont débuté leur parcours par les miellées de pissenlit et d’arbres fruitiers.

2) Une année sur trois (en 2017 dans cette étude), la production moyenne des colonies qui ont réalisé ce parcours colza-acacia est significativement plus importante que celles des autres colonies.

3) Les modèles statistiques indiquent enfin que la production de miel d’acacia des colonies est favorisée lorsqu’elles ont précédemment connu une miellée de colza. En revanche, aucun parcours ne semble avoir favorisé de manière significative la production de miel de châtaigner. Le parcours de transhumance colza-acacia-châtaignier apparaît donc comme le plus favorable pour s’assurer une production de miel supérieure à 15 kg/colonie, mais c’est aussi le plus exigeant d’un point de vue technique.

Tableau ecotox1 : Productions de miel de printemps, de colza et de châtaigner en fonction du parcours de transhumance.

Quels sont les facteurs qui favorisent la production de miel ?

Le nombre d’ouvrières adultes est bien évidement le facteur le plus influent sur la production de miel. Les évaluations réalisées pendant ces 3 années d’étude ont montré qu’elle oscille généralement en moyenne entre 10 000 et 30 000 ouvrières adultes et 10 000 et 35 000 ouvrières immatures (larves et nymphes) au cours de la saison. Les analyses statistiques réalisées à partir de ces données (n=195 colonies) indiquent qu’une colonie composée d’environ 25 000 abeilles et 17 000 cellules de couvain fermé au début de la miellée d’acacia serait en capacité d’assurer une production cumulée de miel d’acacia et de châtaignier comprise entre 15 et 29 kg selon l’année.

La quantité de pollen stocké dans le corps de la ruche favorise la production de miel de châtaigner et dans une moindre mesure celle de miel d’acacia. Les modèles statistiques prédisent en effet qu’une augmentation de 10 % des surfaces occupées par des réserves de pollen permettrait un gain de récolte par colonie d’environ 3 kg de miel de châtaigner et d’environ 0,3 kg de miel d’acacia.

Quels sont les facteurs qui pénalisent la production de miel ?

Comme attendu, ces travaux ont confirmé l’impact négatif de varroa sur la production de miel. En effet, bien que les charges moyennes en varroas phorétiques soient toujours restées faibles dans les ruchers, les analyses ont révélé que des niveaux d’infestation (mesurés avant la miellée d’acacia), mêmes inférieurs à 1 varroa pour 100 abeilles, pouvaient pénaliser la production de miel.

Ces travaux ont également permis de constater que, l’exposition des abeilles à des pollens contaminés au cours des miellées de colza et de fruitier pouvait pénaliser bien plus tard la production de miel d’acacia et de châtaigner. Une analyse approfondie des mélanges de pesticides auxquels les abeilles étaient exposées a montré que les pertes de production de miel pourraient être significativement réduites si plus aucun insecticide ne venait à contaminer le pollen consommé par les abeilles. Une réduction de seulement 10 % de la charge en varroa ferait gagner 0,52 kg de miel par ruche (en cumulé sur acacia et châtaigner).

Pour en savoir plus

Contact : cyrtil.vidau@