Apiculture : réalisation d’un test circulaire européen sur le vol de retour

Par Itsap-Com, le 5 July 2017

Commencée en 2014, la recherche d’une méthode standard pour évaluer les troubles dus à de faibles doses de pesticides sur les abeilles devrait bientôt atteindre une nouvelle ampleur. En effet les différents tests menés permettent une présentation prochaine devant les experts de l’OCDE.

La fin de l’année approche vite… et avec elle, la perspective d’une audition devant l’OCDE ! Synonyme de grand oral pour l’ITSAP, qui travaille conjointement depuis plusieurs années avec les équipes de l’UMT PrADE sur le sujet, cette présentation couronne une série de tests conduits au niveau européen. Décryptage avec Julie Fourrier, qui a intégré l’ITSAP début 2017 pour finaliser la validation de la méthode.

Comment a débuté cette recherche et pour quelles raisons ?

Julie Fourrier : Il existait déjà des tests standards pour évaluer la mortalité des abeilles par rapport à l’utilisation des pesticides. Mais il n’y avait pas de méthode suffisamment aboutie pour mesurer des effets de faibles doses. Notre objectif est donc de mesurer les troubles dus à l’impact de doses qui sont considérées aujourd’hui comme non dangereuses, et ceux-ci sont détectables notamment lors des vols de retour. Cela répond à une demande des apiculteurs.

Comment étudiez-vous les vols de retour ?

L’UMT PrADE a effectué de nombreuses recherches pour mettre au point une méthode basée sur la technologie RFID. Pour cela, on positionne une puce RFID sur le thorax des abeilles. Ces puces RFID permettent un suivi individuel des allers-retours de chaque abeille tagguée grâce à des lecteurs positionnés à l’entrée de la ruche. Alors que cette méthode a permis à l’UMT PrADE d’améliorer nos connaissances des effets des pesticides sur les abeilles, de mon côté je m’occupe de sa validation. A savoir, prouver sa faisabilité, sa sensibilité et sa fiabilité. Nous souhaitons la présenter à l’OCDE en tant que méthode référente au niveau international pour l’évaluation du risque faite sur les pesticides avant leur mise sur le marché.

Quelles en ont été les grandes étapes ?

Nous nous appuyons sur l’étude publiée par Mickaël Henry et al. en 2012. En 2014, les premiers travaux ont conduit à confirmer les effets dans un autre contexte que celui de la publication, une sorte « de validation interne ». Après des résultats concluants, un groupe international fut créé en 2015 avec 10 laboratoires volontaires, en Grande-Bretagne, Italie, Allemagne, Suisse et en France. Le nombre de volontaires nous a agréablement surpris car notre méthode semblait trop « compliquée » pour certains. Après 3 jours de formation, le premier test circulaire fut lancé et il a plutôt bien fonctionné puisque 7 laboratoires ont pu mener le test en entier, avec des résultats comparables.

Que montraient ces premiers résultats convergents ?

Tous ces laboratoires, travaillant dans des situations bien différentes, reproduisaient les effets du produit. Voilà qui constituaient des premiers résultats très encourageants ! Puis en 2016 a eu lieu un nouveau test circulaire intégrant un laboratoire supplémentaire, avec des améliorations méthodologiques afin de simplifier le test. Là encore, résultats convergents pour 7 d’entre eux.

Et en 2017, qu’avez-vous fait ?

Une standardisation de méthode prend souvent plusieurs années puisque l’objectif est qu’elle soit applicable par tous les acteurs dans le cadre de l’évaluation des risques avant la mise sur le marché des pesticides. Même si les résultats sont jusqu’ici très bons, nous tentons encore de réduire leur variabilité. Il est fort probable que le paysage et les ressources alimentaires disponibles pour les abeilles, comme la météo, soient des facteurs de variabilité importants. Nous analysons cela. Il faut rappeler que jusqu’ici aucune méthode réalisée sur le terrain, comme la nôtre, n’a été proposée à l’OCDE.

Et donc bientôt le grand oral ?

Oui, avec une présentation qui se fera intégralement en anglais. Notre objectif est de présenter avant la fin de l’année une première version de méthode. Les experts de l’OCDE se réuniront pour juger la validation de celle-ci. La pression monte !